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Fourrages & pâturageRéchauffement climatique

Année de sécheresse : comment faire face au déficit fourrager ?

par Florian BLOT

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En année de sécheresse, selon les conditions climatiques du printemps et les prévisions météorologiques, il est primordial de s’interroger sur la couverture des besoins en fourrages des exploitations. Plus la prise de conscience est tardive, plus la palette de solutions est restreinte et économiquement pénalisante. Alors mettez toutes les chances de votre côté en posant la problématique le plus tôt possible !

Prenez conscience de votre situation le plus tôt possible : faites un bilan fourrager ! 

 

Il s’agit tout d’abord de faire, l’état des stocks et d’estimer les risques concernant le rendement en ensilage de maïs. Les risques de manque de rendement en maïs sont les plus important en cas de :  

  • terrain séchant ;  

  • semi tardif avec enracinement insuffisant avant l’épisode de canicule ;  

  • zone en fort déficit de précipitations ;  

  • si vous êtes irrigant et contraint de réduire ses apports d’eau. 

Il est important de prendre le temps d’aller voir les maïs pour estimer les rendements (attention aux différences de rendement au sein des exploitations). Il faut dans un deuxième temps prendre en compte la consommation des différentes catégories d’animaux, mais aussi l’hétérogénéité de leurs besoins en termes de quantité et de qualité des fourrages. Le type de rations généralement utilisées sur l’été et l’automne et la confrontation avec l’estimation des stocks doit permettre ensuite de quantifier le déficit en stock pour l’automne et l’hiver prochain. 

Ce premier bilan doit permettre de répondre aux questions suivantes : quel type de fourrage va manquer ? pour quel type d’animaux ? Ce diagnostic de « bilan fourrager » aidera à choisir une stratégie adaptée pour pallier le déficit. 

Il vous faudra ensuite analyser votre bilan fourrager en fonction des risques liés à la récolte du maïs et, surtout, prendre les bonnes décisions ! 

 

Votre bilan fourrager est positif si vos stocks sont supérieurs aux besoins des animaux  

 

Votre bilan fourrager est positif si vos stocks réalisés et vos stocks à venir sont supérieurs aux besoins des animaux.  

Dans ce cas, la situation est sécurisante mais nécessite de refaire un bilan pour la période automne hiver une fois que la récolte en maïs de l’année sera réalisée afin de confirmer ou non les quantités et la qualité du maïs récolté. Ceci vous permettra d’ajuster si besoin les ressources fourragères et énergétique aux besoins du cheptel pour l’hiver suivant. 

 

Votre bilan fourrager est légèrement négatif s’il vous manque moins de 20% de stocks pour passer l’hiver 

 

Votre bilan fourrager est légèrement négatif s’il manque moins de 20% de stocks pour passer l’hiver. Dans ce cas, je vous conseille les adaptations suivantes : 

 

1- Analysez la pertinence du maintien de tous les bovins actuels  

Certains animaux (taurillons, bœufs, vaches de réforme…) peuvent peut-être être vendus prématurément pour économiser des stocks. Ce sont surtout les derniers mois de finition qui coûtent chers en nourriture par rapport au gain de poids potentiel. 

En ce qui concerne les vaches laitières, adaptez les effectifs en fonction d’une prévision laitière. En general vous n’avez pas l’habitude de réduire les cheptels et les augmentations de référence font que le nombre de vaches et de génisses peut mettre à mal le bilan fourrager, les surfaces en culture étant maintenues. 

 

2- Achetez des fourrages en complément.  

L’achat de fourrages est la solution la plus séduisante a priori mais elle peut être difficile à mettre en œuvre dans un contexte global de pénurie de fourrage. Avec beaucoup d’acheteurs potentiels, les prix peuvent flamber. Avant de se lancer dans ces achats, calculez leur prix d’intérêt en lien avec leur valeur alimentaire et les autres solutions possibles. 

 

3- Donnez de la paille à vos génisses  

Si les génisses n’ont pas assez de pâture pour cet été, les complémenter avec de la paille achetée (ou du foin) et gardez les meilleurs fourrages pour les vaches. Si les parcelles pâturées par les génisses sur l’été sont accessibles aux vaches, vous pourrez plutôt garder cette herbe (s’il y en a) pour les vaches et passer les génisses complètement en ration sèche (cf article : Génisses laitières : et si vous passiez à la paille ?") 

 

4- Achetez des co-produits  

Achetez des co-produits ou des aliments du commerce en complément des fourrages de l’exploitation. Les différents co-produits, de par leurs valeurs alimentaires et leurs modalités d’utilisation, se rapprochent des concentrés. Ils peuvent être incorporés dans la ration des vaches à hauteur de 3 à 4 kg MS maximum/vache/j soit 20 à 25% des besoins journaliers des vaches. Ils ne remplaceront qu’une petite part du fourrage manquant.  

L’intérêt de ces produits dépendra du prix et du type de substitution réalisée. Le prix plafond de ces produits peut être évalué en reconstituant les valeurs alimentaires d’un mélange Blé +Tourteau de soja ou Blé + Tourteau de Colza. Même si le prix de certains produits de remplacement est supérieur au prix d’équivalence d’un mélange blé/soja, ils peuvent être intéressants s’ils sécurisent la ration sur l’aspect métabolique (exemple : luzerne deshydratée). 

 

Votre bilan fourrager est très déficitaire s’il vous manque plus de 25% de stocks pour passer l’hiver 

 

Votre bilan fourrager est très déficitaire s’il manque plus de 25% de stocks pour passer l’hiver. Dans cette situation il est préférable de ne pas tarder à prendre les bonnes décisions : 

 

1- Anticipez avec une culture fourragère estivale ou automnale 

Si les solutions précédentes ne sont pas suffisantes pour pouvoir passer l’automne et l’hiver suivants, voire disposer de maïs pour aller jusqu’à la récolte suivante, une production fourragère complémentaire est à rechercher. Cela peut être une culture fourragère estivale à implanter après les récoltes de céréales. L’irrigation peut s’avérer indispensable étant donnée les conditions climatiques actuelles. Il existe de nombreuses cultures fourragères estivales, le choix dépendra du type de sol et du mode d’exploitation privilégié. Les résultats sur ces cultures sont assez variables : les espèces implantées sont souvent très résistantes à la sécheresse mais les précipitations (ou irrigation) doivent être suffisantes pour assurer la levée et un minimum de développement (cf article : "Manque de fourrage : implantez des dérobées en été ! " ) 

Dans un contexte sans irrigation et avec un risque important de manque de fourrages, il faut être opportuniste et se tenir prêt lorsque la pluie reviendra à semer des dérobés d’été de type RGI-colza fourrager. Il faudra également se tenir prêt à semer les prairies lors du retour de précipitations pour, le cas échéant, pouvoir les valoriser avant l’hiver.  

 

2- Passez vos vaches en ration sèche 

Les stratégies précédentes ne suffiront peut-être pas dans une situation de fort déficit. En complément ou en remplacement des voies précédentes, certains peuvent envisager de passer les vaches en ration sèche ou semi-sèche. Le surcoût de ces rations, même temporaire, doit être mis en relation avec la marge laitière dégagée habituellement pour analyser leur intérêt. Au-delà de l’aspect économique vraisemblablement très pénalisant, ce sera peut-être la seule voie possible pour éviter une décapitalisation du cheptel souche si la mise en place de culture fourragère estivale ou automnale est compliquée ou infructueuse. 

 

Refaites des stocks de sécurité pour l’année suivante avec un objectif à 15-20 % de stocks 

 

Au-delà de la couverture de vos besoins fourragers pour l’automne-hiver suivants, il faudra également penser à refaire sa sécurité fourragère. Cette sécurité qui permet de passer une année climatique légèrement défavorable est estimée entre 15 et 20% des stocks utilisés habituellement, soit entre 1.5 et 2 mois de consommation des animaux. Il est donc nécessaire de réfléchir également très tôt à l’assolement de l’exploitation pour la campagne culturale suivante. 

Les évolutions du climat peuvent vous inquiéter car vous en êtes tributaires, et il vous faut cependant gérer les fourrages pour vos animaux. Pour autant, les adaptations sont possibles. Il vous faut rester vigilant et anticiper quand un printemps se présente mal. Faire son bilan fourrager, l’analyser, prendre les bonnes décisions... ce n’est toutefois pas toujours simple. C’est aussi pour ça que nous sommes là, jamais très loin, pour vous conseiller au mieux selon vos propres contraintes !  

 

Co-écrit avec l’équipe Fourrage Seenovia 

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