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Agriculture bio

Le maïs population fait des émules !

par Nadège GODFROY

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Les maïs populations, qui ont fait leur retour grâce aux agriculteurs biologiques, commencent aujourd’hui à faire de l’œil aux conventionnels : trouver le maïs adapté à son terroir, à son climat, est finalement un rêve à portée de tous. Le chemin à faire peut paraitre long et fastidieux, mais ceux qui l’ont emprunté ne sont pas revenus en arrière.

En agriculture biologique et même conventionnelle, le coût de la semence peut être un frein, notamment pour les maïs (de 150 à 250 €/ha pour de la semence de maïs). Afin de limiter les coûts d’implantation et de s’assurer de l’adaptation d’une variété au terroir et au climat, une alternative peut être les variétés populations. Les agriculteurs qui se réapproprient la culture et notamment la sélection des maïs sont de plus en plus nombreux et ce, aux quatre coins de la France.

Les maïs populations, de quoi parle-t-on ?

Une population de maïs est une lignée multipliée et sélectionnée par les paysans, composée d’individus exprimant des caractères phénotypiques proches, mais présentant encore une grande variabilité. Elle est donc moins stable et moins uniforme que les variétés dites « hybrides » et elle évolue selon les conditions de culture ou les facteurs environnementaux. Ces populations peuvent présenter plusieurs avantages, particulièrement utiles en agriculture à faible intrants ou biologique :

  • une meilleure résistance des plantes,
  • une rusticité, qui facilite la culture sans intrants,
  • une adaptabilité aux terroirs,
  • une autonomie financière et technique des producteurs.

« Une variété population est un réservoir de solutions » (Véronique Chable, INRA) 

Les maïs populations présentent une meilleure souplesse, notamment concernant la sécheresse. En effet, alors que pour une même variété hybride la maturité est homogène à la parcelle, les pieds d’un maïs population ne sont pas tous au même stade au même moment. La floraison peut s’étaler sur trois semaines, ce qui contribue, par exemple, à limiter les problèmes de fécondation. Dans différentes régions, des réseaux d’expérimentation et de sélection ont vu le jour ces dernières années. L’objectif est d’obtenir des panels de variétés de maïs adaptés aux conditions pédoclimatiques de chacune des régions. Il faut compter deux ans pour adapter les variétés à un terroir. Ensuite seulement, les agriculteurs peuvent se lancer dans une sélection à proprement parler.

 

La sélection massale (au champ) s’opère en 3 étapes :

  • Sélection négative pour enlever les plants chétifs
  • Sélection positive pour l’ensilage en repérant les épis de plantes dont les pieds sont bien verts alors que le grain est mûr
  • Sélection positive à la récolte en conservant la moitié des épis qui avaient été repérés lors de l’étape 2.

 

Quels rendements comparativement aux maïs hybrides ?

Le projet QUALIMAÏSPOP mené en Bretagne et Pays de Loire a voulu comparer les rendements entre maïs populations et maïs hybrides. Globalement, ils n’ont pas observé de différence significative entre maïs populations et maïs hybrides concernant les rendements en MS/ha et MAT/ha. Les écarts de rendement annuels moyens entre populations et hybrides varient de -2 à +1 TMS/ha et de -150 à +100kg MAT/ha pour les rendements protéiques moyens sur 2014 et 2015.

 

Côté loi : qu’a-t-on le droit de faire ?

L’article 12 de la loi biodiversitéde juillet 2016 élargit à tous les agriculteurs leur droit d’échanger leurs semences et plants dans le cadre de l’entraide, dès lors que ces semences et plants n’appartiennent pas à une variété protégée par un Certificat d’Obtention Végétal (COV). L’entraide est définie à l’article L.325-1 du Code rural comme « un contrat à titre gratuit, même lorsque le bénéficiaire rembourse au prestataire tout ou partie des frais engagés par ce dernier ». Elle « est réalisée entre agriculteurs par des échanges de services en travail et en moyens d’exploitation ». Les échanges de semences et plants entre agriculteurs échappent de ce fait à la réglementation de leur commercialisation… Attention, ce droit d’échange n’est pas reconnu pour les semences fermières de variétés protégées par une COV (Certificat d’Obtention Végétal). Une vigilance particulière doit être également portée sur les distances entre parcelles de maïs hybrides et parcelles de maïs population, afin d’éviter les croisements !

 

La sélection doit se faire tous les ans afin de ne pas perdre en génétique. Cela demande un travail conséquent (jusqu’à 40 h/an). Les critères intéressants peuvent être divers, selon ce qui est observé sur la parcelle : hauteur d’insertion des épis, tenue de tige, sensibilité au charbon / à la pyrale, grains bien rangés, fécondation de l’épi jusqu’au bout, grosseur de l’épi… Une précision cependant à avoir en tête : les maïs populations étant plus tardifs que les hybrides et les semis se faisant généralement plus tard en bio, le taux de matière sèche des maïs récoltés peut être relativement bas. Ce critère peut être travaillé via la sélection sur la précocité.

 

Les variétés hybrides de maïs ont été sélectionnées pour exprimer le meilleur de leur potentiel génétique. Malheureusement, et ce constat est d’autant plus vrai en cette période de changement climatique, elles ne sont pas toujours les plus adaptées aux contextes locaux. Au-delà du coût de semence moindre, les maïs populations peuvent être une piste à creuser, afin de sélectionner les végétaux présentant les critères qui vous intéressent vous, et ainsi de cultiver les maïs les plus adaptés à votre contexte pédoclimatique.

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